La lutte contre les déserts médicaux figure parmi nos priorités. 8,6% de la population vit dans une commune souffrant d'une pénurie de médecins généralistes en 2015, contre 7,6 % en 2002, alors qu’un nombre important de praticiens sont proches de la retraite et que ce sont aujourd’hui 14,6 millions de personnes seulement qui vivent à moins de 30 minutes d'un généraliste.
Ce phénomène de désertification est une problématique majeure de notre système de santé rompant durement avec le principe d’égalité d’accès aux soins et qui tend à s’intensifier. Trop de français sont chaque jour confrontés à un parcours difficile : éloignement du cabinet médical, impossibilité de visite à domicile, prise en charge tardive, important délai d’attente d’obtention d’un rendez-vous, éloignement de l’hôpital. Pour lutter contre ces fortes inégalités territoriales, il y a urgence à agir !
Le virage numérique du secteur avec le développement de la e-santé et notamment le déploiement de la télémédecine apparaît comme une solution d’avenir aux nombreuses perspectives.
Depuis 2018, la télémédecine est entrée dans le droit commun des pratiques médicales aux termes de l’article L.6316-1 du code de santé publique. Cette reconnaissance tardive et pour l’instant ciblée témoigne du retard français en la matière. La Suède, connaissant les mêmes difficultés, a marqué sa volonté d’utilisation des opportunités offertes par la numérisation de l’offre de soin en favorisant l’expansion de la télémédecine dès 2006 avec dernièrement le plan « Vision for eHealth 2025 ». Si ce programme poursuit la diffusion à grande échelle de nouveaux outils utilisables par tous, le pays compte également de nombreuses sociétés de télémédecine qui revendiquent parfois jusqu’à 5% de part de marché pour les consultations de soins primaires et emploient plusieurs centaines de médecins. Avec la télémédecine, pas besoin de se voir tout le temps, c’est la surveillance sans le contrôle continu, l’adaptabilité aux besoins de chacun.
En France, d’après le bureau d’études Xerfi, le marché de la santé connectée pèsera 4 milliards d’euros d’ici deux ans. Grâce au développement incontournable de l’intelligence artificielle, ce sont des gains de temps inestimables qui sont offerts aux professionnels afin d’améliorer la qualité des soins aux patients. Ce développement est d’autant plus facilité grâce à la qualité des médecins et ingénieurs français, mais surtout la centralisation des informations au sein de notre administration via le Système national des données de santé couvrant 99% de la population. Tout en sécurisant et améliorant le parcours de soin (meilleur suivi, facilitation des échanges entre professionnels, prise en charge plus rapide ...), nous devons évoquer un véritable virage paradigmatique où le patient ne serait plus passif mais acteur de sa propre santé.
L’e-santé transforme notre relation à la maladie et aide à inventer de nouveaux modèles de soins, comme des nouveaux métiers. Pour préparer ce déploiement en complément de la médecine physique, et si l’attente du secteur est palpable en France, le challenge est précisément de réussir à accompagner financièrement et opérationnellement le développement des nouvelles technologies au service du patient, notamment dans les zones les moins dotées, qui parfois accumulent les vulnérabilités obstacles (déficit en couverture internet haut débit). C’est aussi aux entreprises de s’emparer du champ des possibles de l’e-santé, légitimes comme acteurs à part entière pour participer à cette innovation organisationnelle.